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LA LETTRE BLEUE
(Chaque matin, une citation commentée par Lucia Canovi)


 

09 août 2006

Penser par soi-même ?

S'il y a bien une expression galvaudée, c'est celle-là : penser par soi-même.

Tout le monde semble bien d'accord pour reconnaître qu'il est important, ou du moins méritoire, de penser par soi-même.
Mais qu'est-ce que ça implique concrètement ?... Et à quoi reconnaît-on qu'on pense par soi-même ?....

Tout d'abord, on peut rappeller que "penser par soi-même" est un équivalent strict de "penser". En effet, lorsqu'on ne pense pas par soi-même, on ne pense pas : on se contente de se faire l'écho des idées de quelqu'un d'autre (ou de quelques autres).
On s'imagine parfois que l'expression "penser par soi-même" correspond à un état de concentration extrême, crispé et solitaire - quelque chose comme le penseur de Rodin, en plus constipé.
Penser par soi-même demande au contraire qu'on aille chercher ce que les autres pensent. Toute la différence (et elle est énorme) avec le fait de "penser par les autres", c'est-à-dire de ne pas penser mais juste de réfléchir bêtement comme un miroir, est dans le verbe chercher.

En effet, il a deux façons très différentes de rencontrer les idées des autres.

1/On peut les attraper comme on attrape les microbes, avec l'air qu'on respire - c'est d'ailleurs leur mode de propagation le plus courant.

2/ On peut les chercher activement quelque part - livre, conférence, article, site web, discussion, etc.

Lorsqu'on les attrape, c'est en réalité elles qui nous attrapent. Elles nous dominent et nous mènent par le bout du nez sans même que nous nous en rendions compte. En effet, nous ne savons même pas que nous croyons quelque chose - pour nous, c'est la réalité, la vérité, une évidence indiscutable. Un peu comme quelqu'un qui verrait le monde à travers des lunettes déformées et colorées, mais qui ne le saurait pas : il prend sa vision cubiste ou expressionniste pour la réalité qui l'entoure.

Lorsqu'on les cherche, les idées nous dominent aussi - mais dans la mesure où l'on a souffert pour les trouver, on sait du moins qu'il s'agit d'idées. Et surtout, cette recherche préalable fait qu'on a bougé sa tête, qu'on a changé - même si ce n'est que sur un point de détail - ses croyances. Bref, on est devenu moins bête...

Le proverbe trivial Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis comporte une bonne part de vérité.

En effet, quelqu'un qui n'a jamais changé d'opinion sur rien est dans l'un de ces deux cas :

1/Il a toujours connu la vérité sur tout et ne veut pas troquer la clarté contre l'obscurité, la vérité contre l'erreur.

2/Il n'a jamais réfléchi à rien et se satisfait parfaitement de continuer à croire jusqu'à la mort aux idées bactériologiques qu'il a respiré à la naissance.

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